Washington - La directrice de l'Agence américaine pour le développement international (USAID), Samantha Power, a appelé mercredi les rebelles de la région éthiopienne du Tigré à se retirer "immédiatement" des régions voisines d'Amhara et d'Afar, où le conflit fait rage.
Le Tigré est depuis plusieurs mois le théâtre de conflits qui ont entraîné une grave crise humanitaire, selon les Nations unies. L'aide humanitaire internationale a été confrontée à des défis, notamment des obstacles administratifs.
La situation s'est exacerbée cette semaine après que le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed ait suspendu deux organisations non gouvernementales (ONG) opérant au Tigré, les accusant de "désinformation".
Les ONG Médecins Sans Frontières (MSF) et le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) « diffusent de la désinformation sur les réseaux sociaux et autres plateformes, en dehors du mandat et des objectifs pour lesquels ces organisations étaient autorisées à opérer », ont renforcé jeudi les autorités éthiopiennes, citées par l'agence France-Presse (AFP).
La décision a été condamnée par Washington, l'ambassadeur américain auprès de l'ONU qualifiant la suspension de ces ONG d'"inacceptable".
"Je connais très bien le travail de MSF et du NRC et ils sont respectés au niveau international. L'Éthiopie devrait reconsidérer cette décision", a écrit Linda Thomas-Greenfield sur la plateforme Twitter.
Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, a lancé le 4 novembre une intervention militaire pour renverser le TPLF, le parti élu et au pouvoir dans l'État.
L'armée fédérale éthiopienne a été soutenue par les forces érythréennes. Après plusieurs jours, Abiy Ahmed a déclaré la victoire le 28 novembre, avec la prise de la capitale régionale, Mekele, contre le TPLF, le parti qui a contrôlé l'Éthiopie pendant près de 30 ans.
Le 28 juin, Addis-Abeba a annoncé un cessez-le-feu unilatéral, accepté en principe par les forces du Tigré.
Cependant, les combats se sont poursuivis et les forces érythréennes sont accusées d'avoir commis divers massacres et crimes sexuels.
Le mois dernier, les conflits se sont étendus aux régions voisines d'Afar et d'Amhara. Les organisations humanitaires se plaignent que malgré le cessez-le-feu, l'accès reste limité, contraint par l'insécurité et les blocages administratifs.
Samantha Power, en visite en Éthiopie, a appelé les autorités du Tigré à "retirer immédiatement leurs forces" des régions d'Amhara et d'Afar, ajoutant qu'"il n'y a pas de solution militaire à ce conflit".
Le 1er juin, le Programme alimentaire mondial des Nations Unies a averti qu'un total de 5,2 millions de personnes, soit plus de 90 % de la population du Tigré, avaient un besoin urgent d'aide alimentaire en raison du conflit.
Le secrétaire général du NRC, Jan Egeland, a lancé plusieurs alertes sur Twitter, déclarant en février qu'"en 40 ans de travail humanitaire", il n'avait "jamais vu autant d'obstacles à l'acheminement de l'aide humanitaire".
Lors d'une conférence de presse mardi, le chef des opérations d'aide humanitaire de l'ONU, Martin Griffiths, a estimé que répondre aux besoins sur le terrain nécessitait 100 camions d'aide par jour au Tigré.
Selon l'Ethiopie, mercredi 157 camions de ce type sont arrivés dans la capitale du Tigré, Mekele.
Selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (Unicef), plus de 100 000 enfants pourraient souffrir de malnutrition aiguë potentiellement mortelle au cours des 12 prochains mois, soit 10 fois la moyenne annuelle.